11, 12 et 13 septembre, entre mer et montagnes
11 septembre. Direction Santa Theresa et les environs, juste en face de la Madeleine, une île prisée du nord de la Sardaigne. Nous ne ferons pas cette traversée, le temps, l'argent, certains disent que c'est la même chose, puis de toute manière, on ne peut tout faire. Néanmoins, on se balade, la liste des plus belles plages de Sardaigne en poche. À peine avons-nous quitté la maison, juste derrière Castelsardo, on se gourre un peu, un écart vers le sud, la route est splendide. Nous avons pris en altitude ce que nous avons perdu en latitude, on reste zen, c'est une question d'attitude. Au détour d’une crête, un mégalithe se dresse tel un dragon, une vraie sculpture! On poursuit tranquillement, au petit bonheur la chance. Filets et murailles retiennent les pierres qui abandonnent la lutte contre la gravité. On regagne la côte, Badesi, longue, longue plage de sable fin, déserte à cette heure du matin. De par les « infrastructures », on l'imagine bondée en fin de journée. La route est belle. On croise un homme à vélo tirant une imposante cariolle, d'un âge certain, il fait son petit bonhomme de chemin et nous rappelle Richard Fainsworth dans "The straight story" de David Lynch, ce joli film où un vieillard traverse une partie des États-Unis sur un petit tracteur à gazon pour revoir son frère. Un autre, nettement plus pressé perdra les gonds derrière une caravane qui accompagnait des skieurs de fond, à l’entraînement sur des roulettes. Depuis mon rétroviseur , je l'ai vu bondir hors de sa Audi, prêt à exploser, bouillant italien, certainement latin. Enfin, j'imagine qu'en cas de pépins les athlètes ont certainement pu secourir le chauffeur du mobile-home. RenaBianca, magnifique plage de sable blanc, quelques reflets rose du granite avoisinant teintent le fond de l'eau cristalline. C'est l'heure du lunch. On pousse un peu plus loin, du côté de Palau, le bateau quitte pour la Madeleine. Nous reviendrons tranquillement par les terres à la maison, des paysages de collines et de petites montagnes nous enchanterons. Quinze ans plus tard, les tours jumelles tombent toujours à la télévision .12 septembre. La route vers l'ouest pour joindre la plage de la Pelosa est nettement moins bucolique que celle de la veille. On doit traverser l'arrière de PortoTorres, cette zone industrielle où l'on retrouve citernes pétrolières, cheminées et autres pollutions visuelles. Des déchets jonchent la route, bref c'est pas top. Puis en s'éloignant de la zone urbanisée, lorsque la nature reprend ses droits, on se sent mieux. Une vingtaine de kilomètres de bords de mer et elle est là, la Pelosa. Bon, c'est la même rengaine; sable blanc, eaux cristallines, falaises rocheuses, spectacle grandiose. Tout à un prix, nous ne serons pas seuls sur la plage, mais encore une fois, la théorie d'Anne se confirme, y'a toujours une petite place! Une particularité de La Pelosa consiste dans le fait qu'il y a un grand banc de sable assez haut de sorte qu'on a de l'eau seulement jusqu'aux genoux pendant plus d'une centaine de mètres, une immense pataugeoire.13 septembre. Nous avons réservé une nuit à Villagrande sachant qu'il y aurait beaucoup de route pour explorer le centre ouest de l’île. Tellement de route que nous prendrons les voies « rapides », il n'y a pas d'autoroute en Sardaigne, pour nous rendre jusqu'à Nuoro. De là, après une pointe de pizza plus qu'ordinaire en cafétéria, nous prendrons des voies secondaires pour Dorgali. On voit les montagnes, on les sent et on y va. En fait, on en traverse une et à la sortie du tunnel, paf, la mer. Pas le choix, on descend les lacets et je vais goûter à l'eau d'une petite crique. Galets blancs, gros et petits, bien arrondis. Turquoise, émeraude, cristal, etc. On remonte et on file le long d'une falaise, à 1000 mètres, pendant des kilomètres, la route est belle, je veux dire l'asphalte, le paysage lui est grandiose. Gola su Gorropu, les motos s'en donnent à cœur joie, valsant plus ou moins prudemment. On surplombe une vallée qui semble vouloir nous avaler dirait Ducharme. Anne s'inquiète des petits parapets, parfois, ils sont doubles, ça la rassure. C'était mon plan, faire un peu de route de montagnes, j'avais repéré les altitudes sur la carte, je suis bien servi, je me régale. On quitte cette belle route à Urzulei pour une voie, disons tertiaire afin de nous rendre au gîte. Jusqu'à Talana c'est sympa. Après, pour les quinze derniers kilomètres, on peut se demander pourquoi la route n'est pas tout simplement fermée! J'ai bien ri au début, je faisais mon « tough » devant Anne, mais à la fin, je dois l'avouer, je riais jaune et j'ai aussi eu les jetons, je ne faisais plus le fanfaron. Peut-être ordinaire pour les gens d'ici, mais surréaliste pour nous, pis quand tu ne croises plus personne, que tu ne sais pas de quoi aura l'air la route d'une courbe à l'autre, que ce que tu voies en face de toi, c'est des garde-fou qui pendent en lambeaux le long de vertigineuses parois, qu'une voiture passe de peine et de misère, que les cailloux qui jonchent le chemin ont la taille de voitures, que les chèvres et les vaches se sont appropriées les lieux puisque la végétation aussi à reprit possession du territoire, tu te demande effectivement ce que tu fais là? « Les routes de l'impossible », comme à la télévision! Finalement, Villagrande, petite ville de montagne, authentique, comme la pizza au feu de bois préparée par cette gentille famille.